Ma maison

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jeudi 16 juin 2011

moment de grâce

Moment de grâce au beau milieu d'un jardin japonais, derrière un temple bouddhiste, un lundi après-midi d'été à Kyoto.

Au beau milieu d'une étendue d'eau, debout sur une pierre, je me faisais la plus petite possible pour observer les carpes se faire dorer le dos a la surface de l'eau, pour entendre le croassement des grenouilles dissimulées dans l'herbe tout près de moi, le gazouillement des oiseaux sur les branches, au dessus de ma tête. En tournant la tête, mes yeux se sont posés sur une tortue grise, qui se reposait, le corps coincé entre deux roches, dans un ruisseau où coulait de l'eau claire. Le soleil me réchauffait la nuque, l'absence de bruit urbain faisait bourdonner mes oreilles.

Assises au milieu d'un grand pont couvert à quelques mètres de moi, quatre vieilles japonaises, toutes coquettes avec leurs foulards de soie autour du cou, leur sac de cuir vernis et leur tout petit souliers, potinaient a voix basse pour passer le temps. Aucun autre témoin de cette scène magique que moi et elles. Je me sentais comme une intrus dans leur jardin secret. Je les ai rejoins, me suis assise près d'elles et j'ai admiré la vue en silence. De grand arbres aux feuilles vertes et rouges, des fleurs de couleurs pastel, des sentiers entre les bassins d'eau, un héron chassant habilement ses proies sur le rivage, des poissons orange et blanc, les rayons du soleil qui faisaient scintiller la surface de l'eau, un léger vent qui venait rafraichir cette journée chaude de juin. Mes sens étaient comblés et ma tête était remplie et vide a la fois.

Je me suis rappelé la dernière fois ou je m'étais sentie aussi sereine. J'avais 15 ans. J'étais assise dans un autobus voyageur, après une sortie de ski avec les élèves de mon niveau. Près de 17h, nous avancions vers le soleil qui se couchait et qui illuminait le ciel de rayons roses et jaunes. Je me souviens de ce moment comme si je l'avais vécu hier. J'avais dans les oreilles Babylon de David Gray, mes joues me piquaient en se réchauffant, ma tête était posée contre la vitre de l'autobus, et quelque chose s'est emparé de moi et a traversé mon corps comme un éclair. J'ai senti le bonheur le plus vrai, le plus beau m'envahir. J'ai vécu un instant de bonheur pur par surprise, et comme un papillon posé sur une épaule, avant même que j'aie le temps d'identifier le moment pour tenter de le capturer, il s'est faufilé doucement entre mes pensées et s'est dissipé.

Depuis, je parcours le monde la recherche de cet exact sentiment, qui est le plus authentique qui soit. Et voilà que huit ans plus tard, seule et perdue dans mes pensées une fois de plus, j'ai vu ce même moment se pointer le bout du nez, me sourire, me laisser le contempler quelques instants, pour me glisser des doigts.

Je me suis demandé si c'était ça la méditation. Apprendre à retrouver cet instant, apprendre à l'apprivoiser pour le conserver. C'est peut-être ça, l'art du bonheur.









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