Ma maison

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dimanche 13 mars 2011

Stupeur et tremblements

J’étais au travail, dans la sale des employés, en train de préparer des fleurs en papier mâché, avec deux autres employés, quand j’ai commencé à me sentir très étourdie et prise de fortes nausées, comme si j’étais sur un bateau au milieu de fortes vagues. J’ai levé les yeux vers les deux employés qui étaient aussi occupés à d’autres projets devant moi, mais ceux-ci n’ont pas levé les yeux vers moi alors je me suis dis que c’était vendredi, que j’étais très fatiguée, et que peut-être que je couvrais un rhume. Mais quelque chose me disait que ce n’était pas seulement moi, que la force et la surprise de mon malaise étaient trop soudaines pour sortir de nul part. Alors j’ai dit « I feel like I’m on a boat » et à peine après avoir terminé ma phrase, les deux autres employés se sont exclamés, l’air aussi soulagé que le mien « Oh my god you felt it too! », et nous avons réalisé à ce moment que nous venions de vivre un tremblement de terre. Ce qui était étrange, c’est que la secousse était forte, mais que l'on la ressentait sous forme de vagues, très souples, et non de coups. Rien n’a bougé, rien ne c’est déplacé, c’est comme si notre bâtisse était un bateau et que nous venions de traverser une série de vagues. Venant tous de l'extérieur du Japon, nous étions secoués par ce qui venait de se passer. Lorsque des enseignantes japonaises sont entrées dans la pièce, quelques instants plus tard, elles ne semblaient pas bouleversées par cet évènement. Par contre, quelqu'un a mentionné que souvent, les tremblements de terre de ce genre sont des « aftershocks », comme les poussières qui volent dans l’air après que quelqu’un aie éternué. Alors une employée a ouvert son téléphone et a consulté les sites de nouvelles pour voir si l’on parlait d’un tremblement de terre dans la région. C’est à ce moment que l’on a appris qu’un gros tremblement de terre avait frappé Tokyo. Mais à ce moment, aucune information supplémentaire ne nous a été donnée. C’est en rentrant à la maison le soir que j’ai appris, comme le reste du monde, ce qui venait de se passer. Le Nord du Japon était complètement paralysé par la force des secousses et par le tsunami qui avait suivi. À Tokyo, ville qui semblait prête à affronter de telles situations, certaines régions sont gravement atteintes, des magasins sont ruinés, les lignes de trains se sont arrêtées.
Pour nous, c’est extrêmement bizarre de lire de telles nouvelles par le site internet de BBC et d’être si proches des évènements à la fois. Probablement que partout autour de nous, ici dans cette ville, des gens craignent le pire pour leurs amis ou leur famille, d’autres vivent des deuils déchirants, et pourtant, on n’y voit rien. Pas un signe de bouleversement. La vie continue et ne s’est même pas ralentie. Aujourd’hui c’est dimanche, le soleil brille, les gens font leurs courses et accrochent leurs futons sur leurs balcons, comme à l'habitude, comme nous. Demain les enfants se rendront à l’école dans leurs uniformes et leurs chapeaux ronds, les femmes troqueront leurs pantalons en coton pour leurs jupes et leurs talons, les hommes en vestons s’entasseront fatigués dans les wagons de trains, et ainsi va la vie. La force tranquille des Japonais continue de me surprendre alors que pendant qu'une partie du pays s'effrondrait sous un mur d'eau, on entendait à peine les gens murmurer sur les quais des gares.

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